Jean-Gilles QUENUM
Sculptures, Peintures, Photographies, dans la Galerie
à Auzon.30500 Allègre-les-Fumades (Tél :04 66 24 81 66).
RETROSPECTIVE – INTROSPECTIVE
De nombreuses fois, au cours des vingt dernières années, il m’a été demandé : « Si tu devais choisir entre la photographie, la sculpture, l’écriture, la musique…». A cette liste, il y a deux ans, s’est ajoutée la peinture.
Je n’ai jamais pu faire ce choix. En fait, il ne me concerne pas.
Je suis métis et il ne m’appartient pas de choisir entre le noir et le blanc en moi, entre l’Afrique et l’Europe, entre mon père et ma mère, entre les différentes formes que prend l’expression de mon existence. J’ai en moi cette richesse et ce tumulte de deux origines, de deux cultures qui se complètent ou s’opposent ; la difficulté de communiquer cet état de faits est sans doute à la source de ces multiples langages, de ces expressions diverses. Il m’est tout aussi naturel d’explorer les mondes intimes qui m’animent qu’il m’est nécessaire de créer des passerelles entre les différents «continents » de l’expression. Il me semble ne faire que reformuler, avec bonheur ou douleur, ma fascination pour l’existence dans son va et vient entre rêve et réalité .
J’ai commencé par l’écriture(naturel, mon père étant écrivain), puis je me suis mis à photographier, vers l’âge de quinze ans.
A vingt-cinq ans, ayant arrêté mes études de langues, j’ai opté pour la photographie, mais j’écrivais beaucoup par ailleurs (poésies, nouvelles…).
Peu avant trente ans, père d’une petite fille, la vie de photographe, telle que je l’entendais, s’est révélée trop dure ; j’ai alors trouvé dans la sculpture une possibilité de m’exprimer en disant de façon plus tactile, concrète, les formes qui sommeillaient en moi. Je n’en ai pas pour autant délaissé la photographie, celle-ci me permettant régulièrement de formuler, en noir et blanc ou, par la suite, en couleurs, ma vision des gens, des choses et du monde.
Ainsi a été la vie pendant une douzaine d’années : une seconde petite fille, puis un petit garçon, des travaux de restauration de la maison qui ont pris l’ampleur de l’élaboration d’une oeuvre, des sculptures, des photos, des expositions, peu de textes, quelques chansons, jusqu’après quarante ans.
Et puis l’envie de se surprendre, de ne plus rien maîtriser, de retrouver l’enfant en soi, peut-être, malgré les questionnements d’adulte. Des peintures et des poésies en laissant seulement la main gauche s’exprimer ; pour mieux se comprendre en apprenant de soi, de sa part cachée, de cette main méconnue qui ne décide jamais ; pour me révéler à moi-même, prendre connaissance de mes couleurs intérieures.
Voilà tout. J’ai besoin de dire de manières différentes ce qui palpite en moi. C’est ma vie.
Pourquoi aurais-je dû ou devrais-je choisir ?
A chacun(e) de choisir ce qui lui parle dans cet ensemble.
Des photographies en noir et blanc de facture classique à l’exploration chimique du matériau argentique et la déréalisation de l’image, en passant par la mise en scène d’une mythologie intime ou les thèmes récurrents de l’ombre et du reflet ; puis leur déclinaison en couleurs et, dernièrement, en numérique.
Des sculptures en bois d’essences diverses, en pierre, en bronze, en matériaux de récupération assemblés qui reflètent les ancrages multiples dans la terre, dans la chair et le monde,.
Des peintures qui explorent la « jungle de l’âme », cet enchevêtrement d’angoisses et de joies primaires.
Des poésies jouant de la musique des mots et du trouble de leur côtoiement, s’abandonnant à la danse du sens et au rythme intérieur.
Jean-Gilles QUENUM . Octobre 2005.